Poèmes

Ode à l’échec

par Allen Ginsberg

Allen Ginsberg

On ne compte plus les prophètes qui échouèrent, voix tues
cris-spectres dans les caves inaudibles rires poussière dans les greniers de
famille
pas vus pas connus pleurant de soulagement sur des bancs publics sous le ciel
vide
Whalt Whitman qui bissait bravo les défaites locales – vivat aux Femmes
Grasses dans la Galeries des Monstres ! prisonniers nerveux lèvres
moustachues dégoulinant de sueur dans la queue d’attente boustifaille –
Maïakovski qui cria Meurent mes vers, qu’ils meurent comme ces travailleurs
anonymes fusillés à Petersburg !
Prospero qui brûla son livre de Magie & abima sa baguette au fond des mers
dragonnes
Alexandre le Grand échouant à découvrir d’autres terres pour sa Conquête !
Echec, ô échec, je chante le chant de ton nom terrible, accueille-moi 54 années
de prophéties passées
à faire l’épique du Flop Sempiternel ! Je joins ton Panthéon des bardes mortels
& hâte mon ode de la pression sanguine
affluant au sommet de mon crâne comme si mes minutes étaient comptées,
comme pour le Celte Mourant ! mon Ode
à Toi, Seigneur de Monet l’Aveugle, de Beethoven le sourd, de Vénus
l’amputée Milésienne, de Victoire l’Ailée Cou Coupé !
je n’ai pas su dormir avec tous les garçons barbus joues roses sur qui j’éjacule
Mes tirades n’ont détruit aucune Union d’intellectuels KGB & CIA polos ras
de cou slips longs costumes flanelle & tweed
Jamais je n’ai dissous le Plutonium ni démantelé le Nucléaire avant de me
dégarnir le caillou
Ni réussi à arrêter les Armées de l’Humanité entière dans leur marche vers
Guerre Mondiale n°3
Pas encore parvenu au Ciel, Nirvana, X, et tout le bataclan, pas même quitté la
Terre,
Pas encore su apprendre à mourir.

Extrait de: 
Traduit de l’anglais par Jacques Darras



Poème publié et mis à jour le: 22 November 2022

Lettre d'Informations

Abonnez-vous à notre lettre d'information mensuelle pour être tenu au courant de l'actualité de Poemes.co chaque début de mois.

Nous Suivre sur

Retour au Top