Poèmes

Lettre en Novembre

par Sylvia Plath

Sylvia Plath

Mon amour, le monde
Tourne, le monde se colore. Le réverbère
Déchire sa lumière à travers les cosses
Du cytise ébourrifé à neuf heures du matin.
C’est l’Arctique,

Ce petit cercle noir,
Ses herbes fauves et soyeuses — des cheveux de bébé.
L’air devient vert, un vert
Très doux et délicieux.
Sa tendresse me réconforte comme un bon édredon.

Je suis ivre, bien au chaud.
Je suis peut-être énorme,
Si bêtement heureuse
Dans mes bottes en caoutchouc,
A patauger dans ce rouge si beau, à l’écraser.

Je suis ici chez moi
Deux fois par jour
J’arpente ma terre, je flaire
Le houx barbare,
Son fer viride et pur,

Et le mur des vieux cadavres
Je les aime.
Je les aime comme l’histoire.
Puis les pommes d’or,
Imagine —

Imagine mes soixante-dix arbres
Dans une épaisse et funèbre soupe grise
Occupés à retenir leurs balles d’or éclatant,
Leur million
De feuilles métalliques haletantes.

Ô amour, ô célibat.
Je suis seule avec moi,
Trempée jusqu’à la taille.
L’or irremplaçable
Saigne et s’assombrit, gorge des Thermopyles.



Poème publié et mis à jour le: 02 August 2019

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