Poèmes

Le Vengeur

par Ponce-Denis Écouchard-Lebrun

Au sommet glacé du Rhodope, Qu'il soumit tant de fois à ses accords touchants, Par de timides sons le fils de Calliope

Ne préludait point à ses chants.

Plein d'une audace pindarique, Il faut que des hauteurs du sublime Hélicon, Le premier trait que lance un poète lyrique

Soit une flèche d'Apollon.

L'Etna, géant incendiaire, Qui, d'un front embrasé, fend la voûte des airs, Dédaigne ces volcans dont la froide colère

S'épuise en stériles éclairs.

À peine sa fureur commence. C'est un vaste incendie et des fleuves brûlants. Qu'il est beau de courroux, lorsque sa bouche immense

Vomit leurs flots étincelants !

Tel éclate un libre génie. Quand il lance aux tyrans les foudres de sa voix. Telle à flots indomptés sa brûlante harmonie

Entraîne les sceptres des rois.

Toi, que je chante et que j'adore, Dirige, ô Liberté ! mon vaisseau dans son cours,

Moins de vents orageux tourmentent le Bosphore Que la mer terrible où je cours.

Atgo, la nef à voix humaine, Qui mérita l'Olympe et luit au front des deux, Quel que fût le succès de sa coutse lointaine,

Prit un vol moins audacieux.

Vainqueur d'Éole et des Pléiades, Je sens d'un souffle heureux mon navire emporté : Il échappe aux écueils des trompeuses Cyclades,

Et vogue à l'immortalité.

Mais des flots fût-il la victime, Ainsi que le Vengeurû est beau de périr; Il est beau, quand le sort vous plonge dans l'abime,

De paraître le conquérir.

Trahi par le sort infidèle. Comme un lion pressé de nombreux léopards, Seul au milieu de tous, sa fureur étincelle ;

Il les combat de toutes parts.

L'aitain lui déclare la guerre ; Le fer, l'onde, la flamme entourent ses héros. Sans doute, ils triomphaient! mais leut dernier tonnerre

Vient de s'éteindre sous les flots.

Captifs!... la vie est un outrage! Ils préfèrent le gouffre à ce bienfait honteux. L'Anglais, en frémissant, admire leur courage ;

Albion pâlit devant eux.

Plus fiers d'une mort infaillible, Sans peur, sans désespoir, calmes dans leurs combats. De ces républicains l'âme n'est plus sensible

Qu'à l'ivresse d'un beau trépas.

Près de se voir réduits en poudre. Ils défendent leurs bords enflammés et sanglants. Voyez-les défier et la vague et la foudre

Sous des mâts rompus et btûlants.

Voyez ce drapeau tricolore, Qu'élève en périssant leut courage indompté. Sous le flot qui les couvre, entendez-vous encote

Ce cri : «Vive la liberté»?

Ce cri!... c'est en vain qu'il expire, Étouffé par la mort et par les flots jaloux. Sans cesse il revivra répété par ma lyre.

Siècles ! il planera sur vous !

Et vous, héros de Salamine, Dont Thétis vante encor les exploits glorieux, Non ! vous n'égalez point cette auguste ruine,

Ce naufrage victorieux !



Poème publié et mis à jour le: 15 November 2012

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