Vraiment cet univers est une docte école,
Où
Dieu son propre honneur enseigne sans parole,
Une vis à repos ' qui, par certains degrés,
Fait monter nos esprits sur les planchers sacrés
Du
Ciel porte-brandons % une superbe salle
Où
Dieu publiquement ses richesses étale;
Un pont sur qui l'on peut, sans crainte d'abîmer',
Des mystères divins passer la large mer.
Le monde est un nuage, à travers qui rayonne,
Non le fils tire-traits de la belle
Latone,
Ains ce divin
Phébus dont le visage luit À travers l'épaisseur de la plus noire nuit.
Le monde est un théâtre, où de
Dieu la puissance,
La justice, l'amour, le savoir, la prudence,
Jouent leur personnage, et comme à qui mieux mieux,
Les esprits plus pesants ravissent sur les deux.
Le monde est un grand livre, où du souverain maître
L'admirable artifice on lit en grosse lettre.
Chaque œuvre est une page, et chaque sien effet
Est un beau caractère en tous ses traits parfaits.
Mais tous tels que l'enfant qui se paît dans l'école,
Pour l'étude des arts, d'une étude frivole,
Notre œil admire tant ses marges peinturés,
Son cuir fleurdelisé, et ses bords sur-dorés,
Que rien il ne nous chaut d'apprendre la lecture
De ce texte disert, où la docte nature
Enseigne aux plus grossiers qu'une
Divinité
Police de ses lois cette ronde cité.
Pour lire là-dedans il ne nous faut entendre
Cent sortes de jargons, il ne nous faut apprendre
Les caractères turcs de
Memphe les portraits,
Ni les points des
Hébreux, ni les notes des
Grecs .
L'Antarctique brutal, le vagabond
Tartare,
L'Alarbe plus cruel, le
Scythe plus barbare,
L'enfant qui n'a sept ans, le chassieux vieillard,
Y
Ut passablement, bien que dépourvu d'art.
Mais celui qui la foi reçoit pour ses lunettes,
Passe de part en part les cercles des planètes,
Comprend le grand moteur de tous ces mouvements,
Et lit bien plus courant dans ces vieux documents.
Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012