Sur l'arrière de son bateau,
Le batelier promène
Sa maison naine
Par les canaux.
Elle est joyeuse, et nette, et lisse,
Et glisse
Tranquillement sur le chemin des eaux.
Cloisons rouges et porte verte,
Et frais et blancs rideaux
Aux fenêtres ouvertes.
Et, sur le pont, une cage d'oiseau
Et deux baquets et un tonneau ;
Et le roquet qui vers les gens aboie,
Et dont l'écho renvoie
La colère vaine vers le bateau.
Le batelier promène
Sa maison naine
Sur les canaux
Qui font le tour de la
Hollande,
Et de la
Flandre et du
Brabant.
Il a touché
Dordrecht,
Anvers et
Gand,
Il a passé par
Lierre et par
Malines,
Et le voici qui s'en revient des landes
Violettes de la
Campine.
Il transporte des cargaisons,
Par tas plus hauts que sa maison :
Sacs de pommes vertes et blondes,
Fèves et pois, choux et raiforts,
Et quelquefois des seigles d'or
Qui arrivent du bout du monde.
Il sait par cœur tous les pays
Que traversent l'Escaut, la
Lys,
La
Dyle et les
Deux
Nèthes ;
Il fredonne les petits airs de fête
Et les tatillonnes chansons
Qu'entrechoquent, en un tic-tac de sons,
Les carillons.
Quai du
Miroir, quai du
Refuge,
A
Bruges ;
Quai des
Bouchers et quai des
Tisserands,
A
Gand ;
Quai du
Rempart de la
Byloque,
Quai aux
Sabots et quai aux
Loques,
Quai des
Carmes et quai des
Récollcts,
Il vous connaît.
Et
Mons,
Tournay,
Condé et
Valenciennes
L'ont vu passer, en se courbant le front,
Sous les arches anciennes
De leurs grands ponts ;
Et la
Durme, àTilrode, et la
Dendre, àTermonde,
L'ont vu, la voile au clair, faire sa ronde
De l'un à l'autre bout des horizons.
Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012