Les nombres, jeune
Enfant, dans le ciel t'apparaissent
Comme un mobile chœur d'Esprits harmonieux
Qui s'unissent dans l'air, se confondent, se pressent
En constellations faites pour tes grands yeux.
Nos chiffres sont pour toi de lents degrés informes
Qui gênent les pieds forts de tes nombres énormes,
Ralentissent leurs pas, embarrassent leurs jeux;
Quand ta main les écrit, quand pour nous tu les nommes,
C'est pour te conformer au langage des hommes ;
Mais on te voit souffrir de peindre lentement
Ces
Esprits lumineux en simulacres sombres,
Et, par de lourds anneaux, d'enchaîner ces beaux nombres
Qu'un seul de tes regards contemple en un moment
Va, c'est la
Poésie encor qui, dans ton âme,
Peint l'Algèbre infaillible en symboles de flamme
Et t'emplit tout entier du divin élément :
Car le
Poète voit sans règle
Le mot secret de tous les
Sphinx;
Pour le ciel, il a l'œil de l'Aigle,
Et pour la terre l'œil du
Lynx.