C'était comme le désert. Comme des dunes aplaties.
Tel un troupeau allant vers toujours plus d'eau !
Halluciné ! Comme on aimerait enfin qu'il sorte de la
gorge : le grand cri rouge du couchant.
Ô la terrible anxiété de ceux qui, pieds nus dans la vase,
gravent la date de leur mort sur la pierre mouillée.
Hospice des incurables : dans la vaste salle jaune une
femme évoque, pour d'autres échevelées : la crue !
Mais justement, qu'en est-il du passé de ce fleuve ?
Ah ! Si l'on osait lui demander !
Entrant en force, m'arrachant du manteau de poussier
du brouillard.
* * *
Pourquoi choisir de vivre dans la brume ? Et
Pourquoi s'obstiner ? Cloches d'effroi de l'
Église aux portes murées Comme si de quelque
Côté que notre regard se tourne surgissait un
monde aveugle et las.
* * *
On marche dans la fêlure intime du monde
Ces soubresauts nés de la douleur primitive
Quelle est la voix qui le dira ? Quel sera
ce corps qui saura mener jusqu'à son terme la
Valse triste ? Une voix s'élève à l'intérieur
De nous-même – voix chère –exprimant ce qui s'
Apparente à l'expression de la plainte première
Je suis cet homme-là qui, tant et tant, crut aux ver-
Tiges et qui, désormais, dans la déchirure du lan –
gage se tient, regard clair, miné toutefois, blessé
Dans la fêlure du monde où les plaies suintent
* * *
L'Escaut enfin doré ! Les écailles du soleil qui
accentuent encore le bruit de l'eau et des moteurs
L'Escaut enfin doré ! Où boivent les chevaux on
ramasse à mains plaines ce que je nomme leurs
tresses Quoi ! Serais-je passé là autrefois quand cette
terre plate m'était promise il me semble!
Et dans les prés les abreuvoirs font pourquoi pas rêver
de ce nom: Antwerpen! Devant le fleuve doré
Poème publié et mis à jour le: 18 May 2025