Poèmes

Ils sont sourds

par Marcel Faure

Oreilles bouchées
Dès la naissance
Les parents veillent
Attentifs
Il faut que cela soit fait
Vite
Avant qu'ils n’entendent
Ils sont aveugles aussi.

À cheval su mon bidet
Dans les salons cossus
Ils cravachent
Petites mains dodues
Le cul de leur bonne
Leurs chevaux dociles
Jamais ne crient
Ah les petits salaupiauds
Qu'ils sont mignons
Dressés sur leur ego.

Du haut de l'escalier
Monumental l'escalier
Ils poussent de petits cris
Ils n'ont pas le vertige
Oiseaux de proie
Ils sont nés perchés
Et les serres acérées
Ils sabrent le Champagne
Et leur humanité.

Dans les ports de la nuit
Ils croisent des hommes à la dérive
Ils s'encanaillent un peu
Pour s'aiguiser les dents
Et côtoient la mort blanche
Se nourrissent de l'ombre
Du secret des alcôves
Ils apprennent à imiter la vie.

Handicapés
Trop lourds billets de banque
Ils sont prioritaires
Partout
On les plaint on les envie
Jamais on ne les moque
Trop risqué
Parler avec eux
C'est parler au désert
À un pluvieux ennui.

Ils vivent dans des villes
Au beau milieu des villes
Parfois ils se montrent
Pour les journaux la télé
Pour leurs chiens bien dressés
Grossièrement ils s'expriment
Avec des mots exquis
Qu'ils tiennent des couvents feutrés
Leur enfance barbelée

L'usure ne leur vient pas
Toujours liposucés
Ils meurent ignorant tout
Leurs oreilles bouchées
Ils sont aveugles aussi
S'ils n'étaient pas nuisibles
On pourrait en pleurer

09- 2010

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