Poèmes

Dialogue

par Valery Larbaud

Valery Larbaud

Non pas moi,

Mais les poètes cubains pourraient te bien chanter
O charmante
Concha,

Toi mon rameau de /leurs et ma
Vega
Beal!
Puissé-je te regarder longuement comme on regarde les flammes,

Comme, au cceur de l'hiver, on regarde le jeu :
J'aime à baiser une femme de flammes,

Je veux baiser une femme de feu !

Que je vous porte donc dans mes deux mains, mains brunes;

Que je sois donc ébloui par vous, grands yeux;

Que je sente ton parfum dans l'ombre, rose dorée des .Indes;

Que je te contemple dans la rue ou au théâtre,

Sérieuse, belle et haute, et souriante.

Grande jeune femme impressionnante ; — chiquilla!

Ma femme devant
Dieu! ma bourgeoise ! ma squaivl

Mon noir petit souillon! mon bel oiseau des lies!

Avec mon tomahawk et ma hache de guerre,

Mon quipocamayo et ma coricoya.

Ne suis-je pas le chef indien que lu désirais,

Le maître et l'époux qu'il te fallait, princesse indienne?

Etends-loi, ma beauté, sur cette peau d'ours blanc,

Kl laisse ma main toucher ton visage dans l'ombre;

Tu es plus belle que la
Perricholi, si célèbre,

Et je suis plus généreux que tous les
Vice-Rois ;

Voici des diamants et des perles, —

Mon amour, que voulez-vous encore de moi?

Sa dame
D'autres diamants et d'autres perles.

Un miroir

Vieille
Lola, tu me disais : «
Milordito,

Si j'étais aussi riche que vous serez un jour

Quand votre cher papa aura disparu,

Je passerais tout mon temps à me regarder dans la glace. »

Et je riais, ne comprenant pas bien.

Parlais-tu sérieusement ou le moquais-tu?

Eh bien ! j'ai trouvé ce miroir et m'y regarde

Tous les jours, du matin au soir, sais-tu,
Maïa !

Ce miroir (assez grand pour moi) c'est le
Monde.

(Comme j'ai été content, le jour où j'ai trouvé

Ce mot.
Il me paraissait neuf et bien pensé;

Aujourd'hui je le transcris sans enthousiasme.)

O
Société des
Hommes!
Je m'habitue à ton amertume;

J'y trouve même une douceur inattendue.

«
Monsieur
Moynat m'a dit en songe

Comme c'est bien cela, ô
Solidarité,

Et qu'il est agréable au fond,
Société,

De se faire le complice conscient de tes crimes.



Poème publié et mis à jour le: 16 November 2012

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