Impulpez-moi, dis-je à la jeune bimbo, dont les formes tenaient plus du Ballon des Vosges que de la Plaine des Flandres.
C'était après une conférence où j'avais lu quelques uns de mes textes.
Elle n'en voulait qu'à ma littérature.
Avantages et inconvénients du vers libre. Elle ne l'était pas. Mais elle accepta de prendre un verre chez moi. Et moi je n'en avais qu'après ses avantages un peu trop comprimés. Ma collection d'estampes japonaises ayant fait long feu, je lui débitais des haïkus par tranches de trois.
Là n'est pas la question, vers libres ou pas, insistait-elle, courrouçant sa poitrine en guise de menaces.
Croyait-elle que les poètes ne parlent que des anges des nuages et du ciel et que leurs muses sont parfaitement asexuées ?
Moi j'avais le vibraphone plein d'émotions malhonnêtes, la langue de guingois et le rouge de mise aux joues. Je me rabattis sur un poème courtois me disant que la honte ne tue pas.
Elle, au faîte de son indignation, restait cependant assise dans mon salon en grignotant mes gâteaux. Jugulant sa colère elle me faisait ses compliments sur mes aubes décrites, mes fleurs et mes jardins me refusant toujours de jardiner le sien.
Vous connaissez sans doute cette manie de se biller le corps plus serré qu'un char de foin. Les lacets d'autrefois perdurent en de savants crochetages. Les tissus plus légers y résistent moins bien.
Soudain tout craqua.
Me voilà débandé par un éclat de rire et prêtant à la belle une vieille chemise, je la mis au taxi plutôt que dans mon lit.
2017-01