Poèmes

Les Petites Hontes

par André Schmitz

Les petites hontes que vos doigts égrènent dans la poche de votre caban et qui n'ont pas honte de gangrener vos jours - les heureux et les pluvieux.

dites-leur, je vous prie,

qu'elles peuvent venir prendre des repos

dans les poches de mon paletot

- et vous laisser vous refaire une innocence

Au loin, la voix lente et slave de la soprano, dont le chant coule parallèle aux eaux du fleuve...

-
J'emporterais bien quelque chose de vous, lui avait dit celui qui l'avait approchée sans jamais pouvoir la rejoindre.

Et elle lui avait donné, un peu gênée, le meilleur de ce qu'elle ne possédait pas.

C'est la grande mort que chacun porte en soi '

Et c'est peut-être pour mieux la voir et la toucher, cette mort, que des passantes aveugles offrent à chacun yeux et ventre à dévorer, âme et états d'âme
à renifler.

Et c'est la mort - toujours elle -, qui, honteuse, se vautre dans les corps qui la portent si bien.

Il met votre nom dans sa bouche.

Et commence la lente rumination

de nommer, en broyant d'abord les consonnes,

et puis en savourant les voyelles

dans une tendresse muette de salives

Commence ainsi le crime d'aimer.

Les écailles, les écorces de la mer ont des rugosités couleur rouille.
Le savent bien les passagers clandestins quand le soleil se couche sur les peaux.

Le ventre des eaux par contre est soyeux.
Le savent bien tous les
Jonas et les noyés

- ces voyageurs du dedans,

et les bateaux ivres dont la quille

éclate, comme on sait,

sur l'ordre d'un capitaine adolescent

On lui a donné la robe de sa fille à renifler.
Elle a humé comme une bête, visage enfoui dans l'étoffe encore chaude.
Elle a hurlé animalement sa douleur

- et son bonheur de pouvoir enfin rejoindre dans la mort l'enfant qui la met au monde.



Poème publié et mis à jour le: 13 November 2012

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