Poèmes

Le Nom

par Patricia Farazzi

Le nom du plus petit caillou est
Lacryma.
La larme est la chose la plus petite des choses et la plus petite des choses n'est visible qu'à l'oeil nu.
Voilà.

Un jour nous choisissons de laisser tomber le masque et grande est la surprise.
C'est en chacun de nous que le ciel s'enracine?
Mais ne vas pas chercher autre chose qu'un étirement sans fin de couleurs.

Soudain si je te demandais : que sais-tu? que pourrais-tu répondre?

Ta langue serait tétanisée.
Dire c'est trop dévoiler.
Il y a une foule à ta porte.
Il y a un océan dans chaque regard.
Il y a dans cette ville quelqu'un qui ne comprend plus et qui pleure.
Il y a des mains usées qui parlent.
Il y a des bouches peintes qui se tendent.
Il y a des peaux nues qui se rencontrent.
Il y a le vent.

Et il ne s'arrête jamais pour nous plaire.
Là, précisément là finit notre pouvoir, à ce seuil.
Feuille, nous avons la certitude de la saison.
Humain, nous ne comprenons pas le poids.
L'oiseau ne cesse de nous le répéter.
Oiseau, frère de lait, tétant la même aérienne mamelle.
Tant d'air nous mangeons et nous ne gonflons pas! et nulle caverne ne se creuse dans les falaises de l'éther.
Tant d'air!

Et l'oreille devient le substrat du coeur.
Je ne me souviens ni des faits ni des exclamations.
Je me souviens d'une falaise rouge, d'un bébé pieuvre, d'un sourire, d'un citronnier, de l'odeur du premier métro, d'un caillou, d'un nuage, d'un baiser, d'une blessure, d'un feu
entre les murs, d'une ride, d'une vague, de la forme d'une fesse, d'une larme.
Je me souviens d'une larme.
Et un enfant me dit qu'il y a plus pire.
Qui vole un oeuf, vole un boeuf.

Et qui affame des millions d'enfants bâtira-t-il un

empire?

Sans doute.

Et les proverbes n'ont jamais faim.

Dans cette chambre, séjourne une voix, elle n'est pas

nuisible, elle est propre, elle dit l'objet, le sillon, le

bol où se caille le lait, le nom d'un insecte, l'âge d'une

larme, la forme d'une rime, la taille d'un pied, l'écart,

la valeur d'une note, une lettre, une simple lettre ou

Rien

Entrer dans une goutte, trouver son coeur, écouter

ses battements et tout doucement s'y dissoudre

Katabasiquement

mais ça ne dure pas...



Poème publié et mis à jour le: 15 November 2012

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