ce n'est pas un feu qui me brûle
— s'il pouvait me laisser en cendres —
c'est un feu qui me tord mais sans la brûlure qui me
tuerait c'est un feu qui brûle à blanc
*
je suis comme une ablette
qui se serait éprise de l'hameçon qui la perd
*
plier ployer
est-ce signe que je te prête allégeance
ou au contraire celui que j'accepte le fardeau de mon
propre excès
*
cheveux tirés
serrés peignes plantés de chaque côté que ce soit
plus étroit affûté fine lame que
d'être seule soit tranchant
fine lame sortie du fourreau où nos jambes nouent
*
pas de victoire qui vaille
ou alors la reddition
encore que toute idée de bataille s'infirme là
toute idée même d'être deux
que d'être deux ait trouvé sa résolution
ait recouvré sa légèreté de fleur de cerisier emportée
par le vent
porter la douleur au rouge
comme on porte le mot aux lèvres
et de te vouloir à la langue du baiser
comme on trancherait la gorge au rouge-gorge pour
lui prendre de chanter vif
*
je me nouerai les cheveux
et je me ressemblerai tellement peu que tu me
reconnaîtras
Poèmes de printemps
le désir du poème c'est comme
celui d'attraper ces fleurs ou ces plumes mais
blanches qui volent dans le vent du printemps
c'est surtout
celui qu'ainsi attrapées
plumes ou fleurs mais
blanches
trouvent à se nommer et peut-être à s'envoler encore
quoique tenues
comme si l'envolée faisait partie désormais du nom
*
peut-être le printemps ne vient-il qu'à cause du désir qu'on en a
et que ces toupets blancs n'en sont que la concrétion qui s'envole une fois le voeu exaucé
*
plus dans un endroit vous vous sentez chez vous
plus il importe que cet endroit ne soit pas à vous qu'il
ne vous appartienne pas le moins
du monde que vous deviez 1'
abandonner
car comment revenir à vous
si vous demeurez
fera-t-on partager
le vert tendre
tellement jaune
d'un plaqueminier en plein
champ abandonné et la
vigueur qu'on y puise dans ce qu'il brille entre les
pins la broussaille et surtout les traces d'un ordre ancien cerisiers qui donnent encore rangées de vignes de
plus en plus confondues aux piquets fera-t-on partager la nécessité de décrire de dresser
le constat même imprécis
et la certitude de ne rien porter en avant un poème parfois dans cet écart
Poème publié et mis à jour le: 15 November 2012