Poèmes

Le Feu

par Maryline Desbiolles

ce n'est pas un feu qui me brûle

— s'il pouvait me laisser en cendres —

c'est un feu qui me tord mais sans la brûlure qui me

tuerait c'est un feu qui brûle à blanc

*

je suis comme une ablette

qui se serait éprise de l'hameçon qui la perd

*

plier ployer

est-ce signe que je te prête allégeance

ou au contraire celui que j'accepte le fardeau de mon

propre excès

*

cheveux tirés

serrés peignes plantés de chaque côté que ce soit

plus étroit affûté fine lame que

d'être seule soit tranchant

fine lame sortie du fourreau où nos jambes nouent

*

pas de victoire qui vaille

ou alors la reddition

encore que toute idée de bataille s'infirme là

toute idée même d'être deux

que d'être deux ait trouvé sa résolution

ait recouvré sa légèreté de fleur de cerisier emportée

par le vent

porter la douleur au rouge

comme on porte le mot aux lèvres

et de te vouloir à la langue du baiser

comme on trancherait la gorge au rouge-gorge pour

lui prendre de chanter vif

*

je me nouerai les cheveux

et je me ressemblerai tellement peu que tu me

reconnaîtras

Poèmes de printemps

le désir du poème c'est comme

celui d'attraper ces fleurs ou ces plumes mais

blanches qui volent dans le vent du printemps

c'est surtout

celui qu'ainsi attrapées

plumes ou fleurs mais

blanches

trouvent à se nommer et peut-être à s'envoler encore

quoique tenues

comme si l'envolée faisait partie désormais du nom

*

peut-être le printemps ne vient-il qu'à cause du désir qu'on en a

et que ces toupets blancs n'en sont que la concrétion qui s'envole une fois le voeu exaucé

*

plus dans un endroit vous vous sentez chez vous

plus il importe que cet endroit ne soit pas à vous qu'il

ne vous appartienne pas le moins

du monde que vous deviez 1'

abandonner

car comment revenir à vous

si vous demeurez

fera-t-on partager

le vert tendre

tellement jaune

d'un plaqueminier en plein

champ abandonné et la

vigueur qu'on y puise dans ce qu'il brille entre les

pins la broussaille et surtout les traces d'un ordre ancien cerisiers qui donnent encore rangées de vignes de

plus en plus confondues aux piquets fera-t-on partager la nécessité de décrire de dresser

le constat même imprécis

et la certitude de ne rien porter en avant un poème parfois dans cet écart



Poème publié et mis à jour le: 15 November 2012

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