Poèmes

Epouvantail 18

par Oliverio Girondo

Pleurer à flots.
Pleurer la digestion.
Pleurer le sommeil.
Pleurer devant les portes et les ports.
Pleurer le sentiment et le sensationnel.
Ouvrir les robinets,
les écluses des pleurs.
Tremper notre âme, notre chemise.
Inonder les trottoirs et les promenades,
et nous sauver de nos pleurs à la nage.
Assister au cours d’anthropologie en pleurant.
Fêter les anniversaires de famille en pleurant.
Traverser l’Afrique, en pleurant.
Pleurer comme un cacuy, comme un crocodile…
s’il est vrai que les cacuys et les crocodiles
ne s’arrêtent jamais de pleurer.
Tout pleurer, mais le pleurer bien.
Le pleurer avec le nez, avec les genoux.
Le pleurer avec le nombril, avec la bouche.
Pleurer d’amour, de lassitude, de joie.
Pleurer en frac, en flatulent, efflanqué.
Pleurer en improvisant, par cœur.
Pleurer l’insomnie et pleurer tout le jour!

Extrait de: 
Traduit par Juliette Gheerbrant et Olivier Favier



Poème publié et mis à jour le: 02 May 2025

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