À mes ancêtres normands
et à tous leurs descendants implantés ici en Amérique francophone
Ah ! Si loin
Pourtant je l’entends qui fredonne
« J’irai revoir ma Normandie,
C’est le pays qui m’a donné le jour. »
Ah ! Si petit marmot
Quatre ans et quelques poussières
J’entends encore la voix de ma petite maman
Sur le perron de la maison
Calée dans sa berçante qui chantonne
Le vieil air normand
« Quand tout renaît à l’espérance.
Et que l’hiver fuit loin de nous,
Sous le beau ciel de notre France,
Quand le soleil revient plus doux,
Quand la nature est reverdie,
Quand l’hirondelle est de retour,
J’aime à revoir ma Normandie,
C’est le pays qui m’a donné le jour. »
Ah ! Si loin
Dans le temps quatre cents ans ou presque
Mes ancêtres normands débarquent ici
En Nouvelle-France la nomme-t-on jadis
Cette lointaine colonie outre-atlantique
Américaine et toujours française
Ah ! Si petiot môme
Quatre flacons de Calvados et quelques pépins
J’entends encore la voix ma petite maman
Emmitouflée dans sa berçante qui fredonne
Le vieil air normand
« J’ai vu les champs de l’Helvétie
Et ses chalets et ses glaciers ;
J’ai vu le ciel de l’Italie
Et Venise et ses gondoliers ;
En saluant chaque patrie,
Je me disais : aucun séjour
N’est plus beau que ma Normandie,
C’est le pays qui m’a donné le jour.»
Ah ! Si loin
Dans le temps moi qui frise la soixantaine
J’entends toujours cette musique dans ma tête
C’est la voix de ma petite maman qui fredonne
Le vieil air normand
Trait d’union entre ma Beauce québécoise natale
Et les doux rivages quelque part près de Caen,
Bayeux et Honfleur
« Il est un âge dans la vie
Où chaque rêve doit finir,
Un âge où l’âme recueillie
A besoin de se souvenir :
Lorsque ma muse refroidie
Aura fini ses chants d’amour »
Qui croit encore à cette histoire vieillotte ?
Qui chante encore cette chanson vieillotte ?
Ah ! Si près
Pourtant je l’entends qui fredonne
« J’irai revoir ma Normandie,
C’est le pays qui m’a donné le jour. »
Ah ! Si petite puce
Quatre ans et quelques grainailles
J’entends la voix de ma petite-fille
Sur la balancelle sous les pommiers en fleurs
Chanter à tue-tête à faire fuir les crécerelles
Le vieil air normand
« Florence, ma petiote,
Qui t’a appris ce beau refrain ? »
Tel un gai rossignol,
Elle me toise du regard avec des yeux de sarcelle
Puis, toute souriante et coquine, elle déclare :
« Mais c’est toi Papy !
Tu me la chantes depuis que je suis toute petite ! »
D’un élan, elle reprend de plus bel
Le vieil air normand
« N’est plus beau que ma Normandie,
C’est le pays qui m’a donné le jour »
Est-ce bien la voix de ma petite maman
Ou celle de ma petite-fille qui fredonne
Et qui se fond dans le tintamarre
D’une volée d’oies blanches au-dessus de ma tête grisonnante ?
Ou est-ce tout simplement la voix de mes aïeux ?
Tant de questions et de mystères
Qui se noieront dans mon verre de Calvados !