S’il est dur avec lui, il est doux avec l’Autre
Et toujours indulgent
Il n’est pas égal à ce païen qui se vautre
Dans l’or et dans l’argent
Sans même qu’un frisson de bonheur lui parcoure
Le cou le dos les reins
Il regarde alentour afin qu’un doux secoure
Ses peines ses chagrins
Et le dur lui tend la main pour qu’il se détende
Auprès d’un cher humain
Lui disant à l’oreille et fort pour qu’il entende
Suis-moi sur mon chemin
Je porte si tu le veux ta quincaillerie
Et tu m’écouteras
Te parler d’un vieil orfèvre en joaillerie
Plein de bijoux aux bras
Mort d’avoir trop rêvé pendant chaque nuit blanche
Au clou perceur de cou
A son lit devenu aussi dur qu’une planche
Donnant aux reins des coups
Où veux-je en venir là où je veux que l’homme aille
Et où tu le voudrais
Mais tu crains tu te dis pourvu que ce choix m’aille
Ou bien je disparais
Alors qu’au fond de toi poussent les bras d’un charme
Rempli de bons bourgeons
Enclins à s’ouvrir sur des feuilles dont le charme
Attire les pigeons
Les tourterelles les pinsons les rouges-gorges
Et les mignons serins
Sifflotant tout autour les vois-tu mon cher Georges
Tes sens sont-ils sereins
N’entends-tu pas leurs chants ne sens-tu pas de joie
A les savoir si près
Comprends-tu qu’ils suivent la belle et bonne voie
Où grandissent cyprès
Bouleaux et peupliers marronniers et ce chêne
Aux bras valant de l’or
Ôte don' ta gourmette et ta bague et ta chaîne
Allège-toi alors
Boucle tes sandales prends ce bâton de marche
Et fends la joue du vent
Fatigue l’horizon tiens-toi droit sous chaque arche
Et sois toujours devant
Tu gagnes des cors aux pieds et tu perds du ventre
Puis ton corps s’endurcit
Voilà tu sors petit à petit de ton antre
Et ta vue s’éclaircit
Tu ne voyais que le clinquant que l’artifice
Du mortifère ennui
Grâce à ce sursaut ce morceau de sacrifice
Tu tues ce qui t’a nui
Je t’admire ainsi que l’œil aigu du rapace
Mais moins que mes amis
Gel soleil neige et pluie fendeurs de carapace
Que je passe au tamis
Je vois des fleurs blanches-bleues sortir de ta bouche
Des oreilles des yeux
Une abeille déjà s’approche peu farouche
Et inspecte les lieux
Des centaines viennent tu me dis mais on m’aime
Que donc espérer mieux
Tu es dans un rêve et le bonheur est lui-même
Un don venu des cieux
Ton être est fou de joie tes branches sont fleuries
Qui déjà ont des fruits
Tu as converti mon ami tes pierreries
En royaume construit
Sur des fondations de racines profondes
Qui tiennent ta maison
Où viennent les oiseaux sans que tu les confondes
Avec ta feuillaison
Tu es dur avec toi et doux avec ton Autre
Va et marche sans peur
Car tu es devenu bien que nu un apôtre
Sorti de sa torpeur
Qui donne du miel à la guêpe et à l’abeille
Bourdonnant en essaim
Qu’elles rapporteront au sein de leur corbeille
Car tel est leur dessein
Tu as offert mieux que le meilleur ce qui lève
A l’intérieur de toi
Qui s’en va haut dehors le Maître voit l’élève
Au cœur touchant le toit
De son Ciel et la blanche et pure tourterelle
Prend cet organe sain
Sous son aile et d’une manière naturelle
Emporte fière un Saint.