(extraits)
Deuxième conte
XIV
La mer est à nous
la mer est à boire
la mer tout entière se loge
dans le creux de la main.
Si tu te remplissais
te barbouillais d'azur ?
Si ton pied foulait la mer ?
Si ta main apprenait les caresses océaniques ?
Si les vagues sur ton corps ?
Si les algues mêlées à ton désir ?
Si le sel sur tes blessures ?
Si la fureur de l'océan dans ton sang ?
Si soudain tu renaissais ?
Si soudain le rire ?
Soudain l'été ?
Soudain les plages de ton enfance et
les chansons ?
Si soudain tu voyais des deux yeux ?
Si tu entendais des deux oreilles le cri de toutes les bouches ?
Et si soudain tu te levais ?
Et si tout aussi soudain tu te mettais
à dire
Non ?
Troisième conte
VII
Par quelle déchirure
voie de violence et de sang
tu es entrée
Soif
dans ce corps sans ombre ?
Vite une oasis
un puits
une trêve.
La mort le rire aux côtes
]e rire aux griffes
lance ses vautours
sur mes épaules nues.
Si je tombe le soleil frappe
et des serpents de routes m'assaillent
et dévoient mes caravanes.
Si je tente vers le ciel
un cri de rage et d'agonie
mon appel se perd
dans le silence toujours plus fort
que la tempête.
Mais allié au piège des sables mouvants mon cri rend impraticable le chemin de l'oubli.
VIII
Ce n'est pas un appel
pour recueillir la pluie
ni pour crever les citernes
ni pour creuser un puits
pas même pour rester stoïque
comme une sentinelle au bord du gel.
C'est un acte pour résumer les mots
dans la bouche
comme le tonnerre résume la colère
des cieux.
Après le cri elle se tait
plus fort
pour en mesurer la portée aux échos
des grottes.
Elle se tait pour souffler
dans les canons vides
soupeser les sacs de poudre
et ajuster son tir.
X
Elle s'est barricadée car elle sait combien le désert est traître.
Elle en fait un sablier et fixe son cou à la chute du dernier grain de cristal.
En attendant elle place une mine dans chaque poème qu'elle lance sans savoir quel front il ira ruiner avant que dans sa bouche la parole lui soit reprise.
Poème publié et mis à jour le: 15 November 2012