Avril est le plus cruel des mois, il engendre
Des lilas qui jaillissent de la terre morte, il mêle
Souvenance et désir, il réveille
Par ses pluies de printemps les racines inertes.
L’hiver nous tint au chaud, de sa neige oublieuse
Couvrant la terre, entretenant
De tubercules secs une petite vie.
L’été nous surprit, porté par l’averse
Sur le Starnbergersee ; nous fîmes halte sous les portiques
Et poussâmes, l’éclaircie venue, dans le Hofgarten,
Et puis nous prîmes du café, et nous causâmes.
Bin gar keine Russin, stamm’aus Litauen, echt deutsch.
Et lorsque nous étions enfants, en visite chez l’archiduc
Mon cousin, il m’emmena sur son traîneau
Et je pris peur. Marie, dit-il,
Marie, cramponne-toi. et nous voilà partis !
Dans les montagnes, c’est là qu’on se sent libre.
Je lis, presque toute la nuit, et l’hiver je gagne le sud.
Quelles racines s’agrippent, quelles branches croissent
Parmi ces rocailleux débris ? Ô fils de l’homme,
Tu ne peux le dire ni le deviner, ne connaissant
Qu’un amas d’images brisées sur lesquelles frappe le soleil :
L’arbre mort n’offre aucun abri, la sauterelle aucun répit,
La roche sèche aucun bruit d’eau. Point d’ombre
Si ce n’est là, dessous ce rocher rouge
(Viens t’abriter à l’ombre de ce rocher rouge)
Et je te montrerai quelque chose qui n’est
Ni ton ombre au matin marchant derrière toi,
Ni ton ombre le soir surgie à ta rencontre ;
Je te montrerai la peur dans une poignée de poussière.
Poème publié et mis à jour le: 11 August 2019