Poèmes

Au Présent des Veines

par Nicole Brossard

1.

une dérive d'intuitions l'enchaînement rapide de la mort et de la vie la beauté du site

2.

surtout ne pas faire semblant que le monde s'est arrêté vlan flèche au liane humaniste surtout regarder empiéter sur la blessure une dernière description œuvre
d'art ou rien du tout

3.

se tenir inutilement mouillée près de la violence la réalité ou la vérité les mâchoires pleines d'énergie je crois qu'il faut des mots simples marcher
longuement la nuit écouter le son de l'eau qui persiste raccourci fiévreux dans l'universel

4.

un soir d'été à une autre femme

je dis toucher n'abolit pas la distance

tout est pratiquement réel

plus personne n'arrive à marcher dans l'absolu

je dis toucher ou caresser à quia

5.

la main tendue telle quelle sans autre argument que l'horizon quelques mots pour me détourner de l'impression que nous avons mal là où rien ne ressemble à rien

6.

alors j'ai pensé au mot destruction

et à tout ce qu'il faudrait rassembler

(été, jazz, corps à corps et tango,

immensité, jardin, rivage et quelques

insectes)

pour éviter de voir

son propre corps à très grande vitesse

recomposer croisant les certitudes

la nuit puis chaque nuit encore la nuit

7.

avoir heu toute une vie dans sa langue maternelle

joie de vie l'avoir là où elle passe rivière creusant sa métaphore pas d'agonie seulement le récit

8.

cette fête et choc de la répétidon

dos à dos l'humanité ses petites lèvres

parlant encore russe, arabe et mandarin

le long des mers et des rosiers

cette procession de vie

«Là, où est la tombe de ma mère » '


Poème publié et mis à jour le: 15 November 2012

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