A une femme d'avril.
Tous nos printemps, tous nos avrils,
Nous les contons dans des vers trop fragiles.
Nous sommes bien trop faibles, avons peu
de style:
Un simple arbrisseau de Virgile
A parfumé tout l'univers.
Et le petit figuier d'Homère
Reste le plus goûteux sur terre.
Mais nos printemps, mais nos avrils,
Je te les conte à toi, femme fragile..
Ces arbres qui flamboient, ces cerisiers graciles
Notre amour un peu frêle, qui n'a pas grand style,
C'est à lui que je tiens.
C'est lui mon vers ancien,
C'est lui mon fil subtil,
Car moi, je tiens ta main,
Petite paume agile,
La serre dans la mienne,
Ses doigts fins et mobiles,
Son poignet juvénile..
Sa blancheur d'opaline..
Nulle nacre troyenne
N'a lui comme la tienne.
Sur tes lèvres s'étale
Un sourire facile.
Tu fus, fille joviale,
Oubliée par Eschyle..
J'aime mon Avrilaine
Mieux que la belle Hélène.
Car moi, j'ai découvert
Dans tes yeux si présents,
O, comme chez Homère,
Mon île claire, mon univers,
Et les saules pleurants
De tes cheveux mouillant
Sous l'ondée de grésil.
Je t'ai trouvée, sibylle,
Bel avril suffisant.